Ce 4 décembre 2013, B. Bayenet, professeur à l'ULB et vice-président du CRAIG, a été auditionné lors de la réunion conjointe de la Commission des affaires générales, de la simplification administrative, des fonds européens et des relations internationales du Parlement wallon et de la Commission des Relations internationales et des Questions européennes, des Affaires générales et du Règlement, de l'Informatique, contrôle des communications des membres du Gouvernement et des dépenses électorales du Parlement de la Communauté française.
L'insertion des personnes d'origine étrangère sur le marché du travail
Présentation de l'article de T. De Keyser, Ph. Delhez, H. Zimmer :
"En Belgique, le taux d'emploi des personnes originaires d'un pays extérieur à l'UE, à 45,8 % en 2011, est le plus bas de tous les États membres. Mis en relation avec celui des personnes nées dans le pays de résidence, l'écart approche les 20 points de pourcentage. En revanche, s'agissant des immigrés européens, ce différentiel vis à vis des natifs est très réduit.
La population née à l'étranger représente environ 14 % de la population totale résidant en Belgique. Les principaux pays d'origine sont le Maroc, la France, les Pays-Bas et l'Italie, qui représentent ensemble près de 40 % des immigrés.
Les caractéristiques socio-démographiques de cette population diffèrent de celles des personnes nées en Belgique. Si l'âge, le genre ou le niveau d'éducation peuvent influer sur la probabilité de décrocher un travail, il a été calculé que, à structure de population égale (à celle des natifs), le taux d'emploi moyen des immigrés varierait à peine. Toutes caractéristiques égales par ailleurs, l'effet « naissance à l'étranger » exerce une incidence significativement négative sur la probabilité d'accéder à l'emploi. Néanmoins, certains paramètres, tels le lieu d'obtention des diplômes, la maîtrise de la langue du pays de résidence, ou encore les réseaux sociaux, échappent à l'analyse, alors qu'ils pourraient également constituer des facteurs explicatifs à cet égard.
Les problèmes relatifs à la reconnaissance des diplômes étrangers et le faible développement de la validation des compétences constituent sans doute des obstacles supplémentaires. En effet, même lorsque les personnes d'origine étrangère ont terminé des études supérieures, leurs chances de travailler restent nettement inférieures à celles des natifs de Belgique.
Seules 37 % des femmes d'origine extra-européenne travaillaient en 2010, soit quelque 20 points de pourcentage de moins que les hommes de même origine ou que les femmes natives de Belgique. Les responsabilités familiales, les perspectives de travail précaire et le modèle social sont quelques-uns des motifs susceptibles d'expliquer ce déséquilibre.
Le taux d'emploi des enfants d'immigrés, une population encore relativement jeune, est lui aussi inférieur à celui des enfants de parents d'origine belge. Le fait d'avoir un parent né en Belgique augmente leurs chances de trouver un travail, ce qui tend à confirmer l'importance des aspects linguistiques et sociaux. De fait, les inégalités commencent dès avant la recherche d'emploi. Selon les études PISA de l'OCDE, la situation socio-économique des parents explique largement que les résultats scolaires des élèves issus de familles immigrées soient inférieurs à ceux des élèves d'origine belge.
Au delà des caractéristiques individuelles, les phénomènes de discrimination à l'embauche ne peuvent être écartés selon une étude du BIT. Ces phénomènes sont confirmés par d'autres travaux plus récents, tels que le baromètre de la diversité dans l'emploi, présenté par le Centre pour l'égalité des chances.
Les personnes d'origine étrangère qui ont un emploi sont proportionnellement plus actives que les natifs de Belgique dans certaines branches réputées plus précaires, comme l'horeca ou les services d'entretien, tandis qu'elles sont sous-représentées dans l'administration publique et l'enseignement. En outre, plus d'une personne d'origine extra-européenne sur trois exerce un travail qui ne correspond pas à son niveau d'études. Par ailleurs, compte tenu de la plus grande importance que représentent pour eux les contrats temporaires et le temps partiel involontaire, l'on ne peut exclure que ce groupe à risque soit amené à accepter des postes moins stables ou à horaire réduit pour accéder à l'emploi."